La Bassée: NON à l'A24

Philippe Waymel, maire de La Bassée

«J’ai l’impression qu’on a jeté un filet chez nous»
commentaires de Jean-Louis Wattez sur la réunion du mardi 21 mars 2006
commentaires de Gérard Caby (UDF développement durable) sur la réunion du mardi 21 mars 2006

Le maire de La Bassée, Philippe Waymel a déclaré au conseil municipal «L’A 24, il est de notre devoir de dire stop»

C'est à force d'assister aux réunions auxquelles il a assisté menée qu'il s'est rendu à cette évidence, le dossier s'épaissit chaque jour mais les opinions se forgent. «Comme on dit tout et n’importe quoi sur l’A 24, j’ai assisté à toutes les réunions. Et je me suis rendu compte qu’il faut vraiment faire attention à cette autoroute.»

Il se sent pris comme un poisson dans la nasse, à Quesnoy sur Deûle, le maire se plaint des tracés saumons, Philippe Waymel se sent comme le saumon prisonnier dans les filets que l'on tend sur son territoire. En regardant la carte des tracés, il s'exclame : «J’ai vraiment l’impression qu’on a jeté un filet chez nous. On est en plein dedans.» Les mailles du filets sont serrées et le produit de la pêche ne sera pas pour les riverains car l'autoroute ne desservira pas la commune puisqu'il n'y aura pas d'accès prévu. C'est le constat que l'on fait presque partout.

Ainsi le maire constate amèrement: «Autoroute de transit et à péage, les échangeurs seront limités. Elle n’apportera aucune solution pour la circulation urbaine métropolitaine. Elle n’aura aucune influence bénéfique quant aux dessertes locales. Ce sera une “camion route” qui amènera au contraire une augmentation du trafic!».

Il rappelle la fameuse citation de Saint-Exupéry, auteur du Petit Prince. «Nous n’héritons pas de la terre de nos ancêtres mais nous empruntons celle de nos enfants. L’A24 aura des répercussions négatives sur l’environnement sur des secteurs protégés à ce jour et considérés comme le poumon vert du sud-ouest de la métropole. Pensons à l’agriculture. À la nappe phréatique. À l’augmentation de la pollution!»

Selon Philippe Waymel, il y a d’autres alternatives qui doivent être étudiées comme les 2 fois 3 voies de l’A 25 à partir de Nieppe, le canal Seine-Nord et le ferroutage.

L'opposition n'a pas suivi le maire pour voter une motion d’opposition catégorique et définitive à tout projet d’A 24, qui sera envoyée au préfet de Région. Guy Benifel a prétexté ne pas en savoir assez pour se faire une opinion, qu'à cela ne tienne, le maire convie les habitants, le mardi 21mars, à une réunion d’information en présence de Jean-Louis Hélary, directeur régional et départemental de l’équipement. «Ce ne sera pas la peine de l’insulter. Comme cela a été le cas à Radinghem, a prévenu Philippe Waymel. Il faudra l’écouter. Après, on verra ce qu’on fera.»

Réunion du 21 mars à la Bassée
note: j'ai ajouté quelques commentaires (en vert) en marge des propos tenus par M. Hélary

On se demande bien qui veut l'A24 dans le Nord!

Environ trois cents personnes, pas sassez pour remplir la salle de sport réservée pour l'occasion par le maire pour accueillir un débat contradictoire avec J L Hélary, directeur régional de l’Équipement,  qui s'est déplacé pour l'occasion malgré l'hostilité ambiante face à l'autoroute et sa propre personne: bon nombre de témoins de ses interventions l'ont jugé méprisant, le terme de populace n'a tujopurs pas été digéré. Il commence par «Je suis mandaté par le préfet pour présenter la situation, et répondre à vos questions». Il rappelle que des réunions de concertation avec la population sont programmées dans le Nord - Pas-de-Calais à partir du mois d'avril, la première se tiendra à Béthune le 13 avril.
 

C'est la classique présentation des fuseaux. «Nous en sommes au choix des fuseaux. Nous allons ensuite réduire la bande retenue de 1000 à 300m en fonction des contraintes techniques notamment. Tout ceci repoussera l’enquête publique à 2008». Il ajoute que c'est à ce moment seulement ou éventuellement juste après la déclaration d’utilité publique (DUP), par un recours administratif, que vous pourrez contester le projet.
«Le but de cette première phase est de choisir un fuseau parmi quatre familles». Dominique Perben, son ministre de tutelle, s'est clairement prononcé pour le tracé dit du Pont du Badou, «au final 150 communes seront directement touchées contre 455 aujourd’hui par la somme des options possibles.»

Note: Comme je le dénonçais le 31 janvier à Lille, le but du gouvernement est de diviser pour régner. En multipliant les tracés il a certes créé beaucoup de mécontents mais ce sera au final une majorité de satisfaits plus grande. Ici le représentant de l'Etat fait un aveu de la stratégie employée pour mettre en minorité les malheureux qui se trouvent sur le tracé retenu.

Choix du tracé. «S’il ne fallait retenir qu’une seule raison pour construire cette autoroute, c’est que la région ne dispose pas de maillage autoroutier nord-sud, alors qu’on a trois axes est-ouest. Actuellement si l’A1 est bloquée tout est bloqué.»
Transit nord-sud: «Les camions venant de Paris pour se rendre en Belgique sans s’arrêter représentent un poids moins important que ce que l’on imagine. Sur l’A1 au niveau de Ronchin, la moyenne est de 20000 camions par jour pour un total de 150000 véhicules.
L’A24 devrait en capter 10000."

Note:  Là où le bats blesse est que s'il y a des arrêts dans la métropole Lilloise ce n'est pas seulement pour la consommation ou la transformation, c'est parce que la politique de flux tendu met les stocks des entreprises sur les routes et qu'il faut pour cette occasion créer des lieux de stockage temporaire. Il faut aussi rappeler que 30% du volume de la plateforme multimodale Dourges provient de Belgique car il n'est pas possible de constituer un train dans ce pays pour le faire traverser la frontière à cause des normes de signalisation différentes entre les deux pays. Le fait est aussi que plus on crée de route, plus on facilite le transport routier, plus les transports se multiplient. cela ne résout pas le fait que nous dépensons 10% de notre PIB à compenser les coûts externes du transport. Jusqu'à quand supporterons nous ce poids économique qui profite surtout à une minorité mais qui accable la santé d'une majorité?

Ce sont environ une cinquantaine de questions qui se voulaient plus dérangeantes les unes que les autres qui ont été posées par des militants d’associations ou d’organismes. En premier lieu «Est-ce que le projet se fera en cas de changement de gouvernement?» qui fait se retrancher le directeur de l'équipement derrière son droit de réserve, la question étant trop politique.

La question du péage? «Ce n’est pas exclu ».
 

Les Belges.- Que se passerait-il si les Belges refusaient l’A 24? "Cela remettrait le projet en question" doit admettre J L Hélary. «Mais nous travaillons avec les différentes instances de ce pays, qui veut surtout une liaison entre Poperinge et Steenvoorde pour accéder par l’A 25 au Tunnel sous la Manche. Une étude cofinancée par les deux pays est même en cours de lancement" ce qui est un nouvel élément au dossier. L'A24, rappelons le a été présenté comme le chaînon manquant Nord Sud de la Norvège à la péninsule ibérique selon le rêve de Bruno Bonduelle, ce qui excluait les tracés à l'Ouest.


Le tout routier.-  Robert Trouvilliez  de Nord Nature repose la question de l'utilité de l'A24 quand le sentiment général est de favoriser le transport ferroviaire. Réponse pragmatique du technicien:  «Le transport ne se résume pas aux infrastructures, c’est du service. Le ferroutage demande aux entreprises de s’adapter. À moins de décisions politiques sur le plan de l’Europe tout entière, sa part de marché évoluera très lentement. Pour le moment, seule la Suisse a imposé de mettre des camions sur des trains». Réponse plus qu'embarrassée à Annie Lebas de Logies Campagne dont la ville se trouve sur les tracés de trois liaisons  à grande vitesse: L'A24, le contournement de La Bassée, la liaison La Bassée Béthune!

L’eau.- J.-L. Wattez de Lestrem Environnement, vice-président du Schéma d’aménagement et de gestion des eaux de la Lys (SAGE) était davantage préoccupé par les champs captants des collines de l’Artois qui alimente Violaines et Givenchy qui accuse la négligence de la DRE: «Vous confondez protection des captages et préservation de la nappe?». Le directeur de la DRE admet ici aussi que «les techniciens ont effectivement détecté des secteurs sensibles. Mais il existe des solutions techniques qui permettent de respecter les contraintes légales (comme l'évacuation étanche des eaux et l'interdiction de construction de stations services essences pour les carburants)".


Les maires des Weppes: Mme A.Lung de Aubers,Mr Huchette de Fromelles,Mr Delepaul de Bois Grenier,Mr Wacrenier de Radinghem

Canal Seine-Nord: «S’il est important de réaliser le canal, VNF estime que dans le meilleur des cas, il absorbera l’équivalent de 2000 camions par jour, dont 1000 empruntant actuellement l’A1.»

note: M. Jacques Muttez, chargé de mission de la FNTR, a déjà des réponses à ce sujet.
1) la mise en eau du canal va consommer énormément d'eau
(j'ajoute personnellement que cette eau sera rapidement polluée car certains se permettent de jeter n'importe quoi dans les voies d'eau, mon expérience de vice-président du syndicat intercommunal de la Becque la Neuville sur le secteur de Tourcoing m'a fait faire ce triste constat)
2) le fret ferroviaire comme la voie d'eau repose sur le principe de la massification des flux contrairement à la route qui prend et dépose n'importe quelles quantités. La voie d'eau va donc prendre du fret au rail, pas à la route.


Mr Delepaul maire de Bois Grenier interpelle M. Hélary

Escroquerie intellectuelle - la tension a atteint son maximum lors de l’intervention des maires de la communauté de communes de Weppes (Radinghem, Fromelles, Bois-Grenier, Le Maisnil, Aubert) qui ont pris la décision de participer à toutes les réunions concernant l’A 24. Le président intercommunal  M. Delepaul pose la question des bénéfices pour la population: «Parler d’une autoroute sans évoquer les échangeurs est une escroquerie intellectuelle ». Pas de réponse de l'intéressé visiblement offusqué par cette tirade! Le micro fait les frais de son agacement quand il est claqué sur la table.

Hystérie collective? C'est une surprise pour J L Hélary «Je n’ai jamais vu une telle passion lors de réunion d’information, je le ferai figurer dans le rapport au préfet». La mobilisation a donc atteint son but malgré le "côté prématuré" dénoncé par le représentant de l'Etat.



Photos mairie de La Bassée et Jean Marie Delorge

Commentaires de Jean-Louis Wattez sur la réunion du mardi 21 mars 2006
De retour de la réunion de La Bassée . Environ 150 personnes et deux orateurs : Mr le maire de La Bassée et Mr Hélary.
 
Présentation d'environ 30mn du DRE sur l'historique , la situation actuelle, les choix qui seront effectués cette année et l'échéancier à l'horizon 2015!
Quelques éléments : 
- L'A24 ne prendra que peu de véhicules au trafic à l'entrée A1 de Lille de l'ordre de 6000. 
- Des études sont en cours avec les belges mais si les belges n'en veulent pas ce sera un problème  majeur
- La décison est politique : que fera le prochain ministre de l'équipement? Il s'est retranché derrière son rôle de fonctionnaire .
- Concernant la "populace" il s'est dit avoir été choqué par les propos tenus à Radinghem ...
- Il a été très vexé par l'intervention du maire de Bois Grenier qui a qualifié d'"escroquerie intellectuelle" le fait de ne pas donner les échangeurs potentiels.
- concernant l'eau et les champs captants il mélange le périmètre de protection de captages et la protection des champs captants et sur ce sujet il fait profil bas...
- Il n'a jamais vu un dossier qui soulevait une telle contestation!
 
La position du maire de La Bassée en conclusion a été très claire et sans ambiguité contre l'A24.
 
Rendez vous demain 15h à Givenchy les La Bassée  devant la mairie et demain soir à 19h30 à Lestrem sur les menaces pesant sur la ressource en eau du bassin Artois Picardie.
 
Bien cordialement.
 
Jean-Louis Wattez.
Lestrem Nature
site internet www.lestrem-nature.org

Commentaires de Gérard Caby

J'étais aussi à La Bassée hier : le peu de participants m'a également surpris.
Surprise aussi, comme tu le dis, Jean-Louis, d'entendre reconnaître, en une phrase parmi toutes celles prononcées pendant 2 heures, que l'A1 ne sera pas désengorgée par l'A24.
Heureusement que tu as bien précisé la différence entre protection des captages et  protection des champs captant, sinon tout le monde n'y aurait vu que du "bleu" : Mr Hélary a quand même fini par reconnaître qu'il y avait un vrai problème à résoudre...
Et puis, bien sûr, il y a les questions politiques (posées par un certain nombre de participants) que le DRE ne peut pas résoudre : aucune structure pour coordonner la réflexion de chaque ministère sur le réduction de l'effet de serre, la carence du service du fret ferroviaire depuis 20 ans et une politique beaucoup plus volontariste à engager (à l'échelon européen d'ailleurs) sur les alternatives au tout routier, les infrastructures routières qui favorisent les délocalisations, la reconfiguration d'une société de la croissance (toujours plus et toujours plus vite) en une économie plus qualitative, sobre et favorisant la proximité.
Il est vrai qu'il a été souligné, à la fin, qu'il était dommage qu'aucun politique approuvant l'A24 ne soit présent pour défendre ses positions, et en particulier ce en quoi cette autoroute pouvait doper l'économie locale...
Le Maire de La Bassée a été très clair dans ses positions, j'ai apprécié.
Les explications techniques de Mr Hélary, dans son domaine, étaient claires aussi. Cependant, les études qui ont été confiés à d'autres structures m'ont laissé perplexes : les champs captant (non résolu), les chiffres avancés sur la prospective relative aux énergies utilisées en 2050 (1/3 électricité, 1/3 biocarburants, 1/3 énergie fossile.... 1/3 de quoi d'ailleurs ?).
 
G. Caby
UDF-Nord Développement Durable