LA ROUTE ROULANTE

par Jean Louis Hélary directeur régional de l'équipement N PdC


M. Thierry Ménager et M. Jean Louis Hélary

Objet : Débat Public Liaison Autoroutière Amiens-Lille-Belgique
Référence : Question de Monsieur Hervé DIZY

Collectif pour les Nuisances Routières

posée lors de la réunion thématique du 22 Octobre 2003

résidant 69 rue de Linselles 59223 RONCQ

 

Monsieur le Président,

Vous m'avez adressé des questions qui vous sont parvenues, relatives au projet de liaison autoroutière Amiens-Lille-Belgique, afin d'apporter des éléments de réponse.

Je vous prie de trouver ci-après les éléments concernant les questions de Monsieur Hervé DIZY.

Le terme « ferroutage » est un terme générique définissant un transport de marchandises liant le fer et la route et visant à tirer parti de la façon la plus pertinente et la plus efficace des complémentarités de ces deux modes.

Plus spécifiquement, deux types d'organisation radicalement différentes sont possibles :

le transport combiné : des caisses mobiles ou des conteneurs (ou éventuellement des semi-remorques non accompagnées) sont acheminés avant et après le transport ferroviaire par des véhicules routiers.

la route roulante, qui consiste à transporter par train des camions, avec ou sans leur remorque ou semi-remorque, qui sont chargés sur des wagons spéciaux. On parle alors de services de "route roulante" "accompagnés", dans la mesure où le ou les chauffeurs du camion voyagent avec leur véhicule. Certains services, cadencés à fort trafic, sont souvent qualifiés "d'autoroute ferroviaire". De tels services se sont développés dans les régions montagneuses, comme en Suisse, ou pour franchir un obstacle incontournable, comme la Manche. Ils sont particulièrement pertinents là où les infrastructures routières restent insuffisantes voire inexistantes. Outre le Tunnel sous la Manche, la route roulante n'existe en France que dans le tunnel du Mont-Cenis depuis fin 2003. en préfiguration du « Lyon-Turin » à mettre en place d'ici 2020.

Pour le fret ferroviaire y compris pour le ferroutage, il ne faut pas oublier que c'est l'Europe qui doit constituer le cadre naturel de développement car il trouve sa pertinence dans des transports de longue distance, et nous savons que la construction européenne tend à allonger les distances de transport.

L'Europe s'attache donc à lutter contre trois grands handicaps du fret ferroviaire : le manque de concurrence et / ou de coopération entre opérateurs, le manque d'interopérabilité, le retard pris par les infrastructures dédiées au fret et leur congestion. Plusieurs projets de fret ferroviaire font partie des 31 projets prioritaires des réseaux transeuropéens que la Commission Européenne a sélectionnés en 2003.

Le fret ferroviaire français, qui semblait au cours des années 1990 pouvoir se développer à nouveau, a connu ces dernières années des résultats moins satisfaisants, qui ont conduit la SNCF à décider en fin d'année 2003 un plan de restructuration de son activité fait, avec des objectifs forts à l'échéance de 2006.

En outre, tout comme le transport routier, on relève la saturation de certains axes ferroviaires clés sur le réseau français comme dans de nombreux pays européens. Il est vrai que dans notre pays, alors que le réseau autoroutier a connu une expansion considérable depuis 40 ans et qu'un véritable réseau ferroviaire voyageurs à grande vitesse s'est mis en place depuis plus de 20 ans, très peu d'investissements ont été faits au cours des dernières décennies sur le réseau ferroviaire classique utilisé pour le fret et sur le réseau fluvial. Il faut toutefois noter que le fret ferroviaire a indirectement bénéficié du TGV qui a libéré des sillons sur certains axes nationaux.

Des dispositions récentes tant au niveau européen que national ainsi que le schéma de service collectif de transport de marchandises, approuvé par décret du 18 avril 2002, ont introduit désormais la notion d'axe ferroviaire à priorité fret, véritable révolution culturelle dans un pays de tradition ferroviaire ayant presque systématiquement privilégié les voyageurs. Depuis le 15 mars 2003, le réseau ferroviaire est ainsi ouvert à l'entrée de nouveaux opérateurs européens de fret international. En revanche, la construction de nouvelles infrastructures est confiée à Réseau Ferré de France.

Sur le corridor nord de la France, le fret ferroviaire a toutefois bénéficié au cours de ces dernières années d'investissements significatifs, avec notamment la plate forme multimodale Delta 3 de Dourges, dotée d'un important chantier de transport combiné rail route, et les travaux inscrits au contrat de plan Etat Région Nord Pas de Calais sur certains nœuds ferroviaires saturés, sans oublier le tunnel sous la Manche, qui autorise des relations internationales performantes pour les trains de fret depuis une dizaine d'années, ni les investissements réalisés sur le port de Dunkerque.

Lors du Comité Interministériel d'Aménagement et de Développement du Territoire du 18 décembre 2003, le Gouvernement a notamment identifié de grands itinéraires ferroviaires de fret qui, pour le nord de la France partent du débouché du tunnel sous la Manche et du port de Dunkerque et se dirigent vers le sud est, d'une part vers Amiens et le contournement de l'Ile de France par Reims, d'autre part vers Lille, Valenciennes, la Lorraine et Lyon. Ce choix confirme le fait que les trafics ferroviaires de fret qui concernent le nord de la France sont surtout orientés suivant un axe nord-ouest - sud-est (depuis la Grande Bretagne et Dunkerque en direction de l'est de la France, de l'Allemagne et de l'Italie), alors que la LAALB est plutôt orientée nord-est sud-ouest (depuis les ports d'Anvers et Rotterdam vers la région parisienne, l'ouest de la France et la péninsule ibérique).

Je vous prie d'agréer. Monsieur le Président, l'expression de mes salutations distinguées.

Jean Louis Hélary