Débat
public du 24 janvier 2002 à Linselles
Environ 300 personnes ont répondu à l’appel du collectif pour assister au débat proposé par le député de la 10ème circonscription M. Balduyck qui avait invité la vice-présidente de la région Nord Pas de Calais, Mme Jeannine Marquaille, en charge du dossier transports et Monsieur Paul Astier, maire de Bondues et vice président de LMCU en charge du Plan de Déplacement Urbain. La vocation du collectif est de donner l’occasion aux associations de s’exprimer et à travers celles-ci les habitants de la métropole.
C’est
ce qui s’est passé hier soir de façon magistrale avec l’association PLAINE
de Linselles adhérente du collectif. De nombreuses associations ont été représentées,
comme Nord Nature, le collectif pour une alternative à l’A24 de M. Oscar
Loubry, EDA et sa nouvelle présidente Mme Anita
Villers, nous ne pourrons pas toutes les citer. Il est important que les
habitants de la métropole soient tous représentés dans les débats qui les
concernent. Le collectif veut réunir toutes les associations qui s’activent
sur les questions de l’environnement et de la sécurité routière que M.
Astier a, à juste titre, associées dans le PDU.
Le but a été atteint, des rafales de questions ont été posées, elles ne sont pas restées sans réponses. Jean-Pierre Balduyck et Paul Astier pour la métropole Lilloise, Mme Marquaille pour la région ont affirmé leur volonté de lutter contre l’A24 et d’appuyer les demandes des communes pour lever la réserve dans le POS du tracé de l’A24.
L’utilité
de l’A24 est en effet remise en question. Des études de la DDE
montrent que le délestage de l’A1 prévu par l’A24 serait inefficace, le
trajet par l’A17 (Dottignies en Belgique) et un tronçon « A1 ter »
entre Tournai et Douai est la seule solution qui permettrait de drainer le
trafic international qui sature le réseau interne à la métropole.
Paul Astier a bien fait remarquer que le projet A1bis devenu A24 date de 1971. Depuis, des constructions qui n’auraient pas dû pousser aux abords du tracé de l’A24, rendent plus difficile encore la mise en œuvre de l’A24. Jean Pierre Balduyck rappelle que les maires vont insister sur la préservation et l’amélioration du cadre de vie puisque la taxe professionnelle d’agglomération n’incite plus ceux-ci à attirer sur le sol de leurs communes des entreprises. L’A24 est en plus une voie directe Roncq-Englos, sans entrée ni sortie, aucun intérêt économique, aucun intérêt pratique pour les riverains juste des nuisances et encore plus de pollution atmosphérique.
Plan d'Occupation des Sols du secteur de Roncq où est prévu de se connecter l'A24 sur l'A22
Comment
en sommes nous arrivés là ?
1)
Les
ports Français ne sont pas arrivés à attirer le trafic maritime
pourtant le littoral Français est de qualité. De ce fait les ports de Hambourg
et Rotterdam se sont fortement développés. Rotterdam est en train
d’augmenter sa capacité de 50%, ce qui va renforcer le flux de marchandises
Nord-Sud. Dunkerque ne représente qu’une infime partie du nombre de
containers débarqués en Europe. Nous nous trouvons alors dans la situation où
des camions sont chargés à Marseille pour transborder à Rotterdam alors que
le Havre ou Dunkerque seraient plus proches.
2)
La
capacité fluviale est sous-utilisée.
2% des marchandises pour la France , 7,6% en moyenne en Europe. Aux Pays Bas le
nombre de mariniers augmente et ils y sont mieux payés. En France c’est
l’inverse. Mme Marquaille a
affirmé que les ponts seront réhaussés pour permettre le passage des barges
de 3000 t. Une personne aura fait remarquer au préalable qu’aux Pays-Bas et
en Allemagne les réseaux fluviaux permettent les chargements de 5000t et
qu’en France on peut au mieux espérer 1800t.
3)
La
SNCF n’est pas capable de répondre aux exigences du marché.
Même si le rail consomme 3 fois moins d’énergie que la route à la tonne
transportée et qu’un train correspond à 50 camions le transport routier coûte
moins cher, est plus rapide et plus régulier. Les grèves et la gabegie financière
de la SNCF la rendent impropre à concurrencer la route. Le trafic de
marchandises a plus que doublé de 1971 à 1996 essentiellement au profit de la
route, pendant le même temps le fret ferroviaire a perdu ¼ de ses parts de
marché ! Sans changement de politique la route progressera de 1,8% à 3,4%
par an, de 0,4% à 2,4% pour le fluvial, de 0,4% à 1,7% pour le rail. En 99 la
route représente 260 giga tonnes kilomètres, le rail 52 Gt.km. Un intervenant
fera remarquer qu’en qualité d’utilisateur professionnel du fret
ferroviaire il doit se battre constamment avec la SNCF pour obtenir des wagons,
pour le respect des délais…
4)
Nous
dépensons 10% de notre PIB à compenser les coûts externes du transport
(coûts qui ne sont pas payés par l’utilisateur direct – Etude INFRAS/IWW)
soit 700 milliards d’€. La FNTR (Fédération Nationale des Transporteurs
Routiers) demande elle-même le renchérissement des transports pour éviter le
gaspillage ! Le gaspillage de transport ce sont des camions qui voyagent à
moitié vides, des délocalisations d’activités vers les pays où la main
d’œuvre est bon marché, la tentation d’avoir les stocks sur la route, de
la pollution inutile, … Nous subventionnons massivement les transports pour développer
un modèle d ‘économie qui n’a aucun avenir puisqu’il porte en lui
les germes de sa propre destruction.
5)
En
France, en Suisse et en Autriche, une étude de l’OMS montre qu’environ
20.000 personnes meurent de façon précoce à cause de la pollution atmosphérique
routière. On estime que la pollution routière tue autant que
les accidents de la route. Pour l’ensemble des transports la route génère de
91 à 99,7% des polluants, le rail de 0,1 à 1,1%, la voie d’eau 0,2%. Au
rythme actuel de la progression des transports, tout progrès réalisé pour réduire
à la source l’émission des polluants est neutralisé par l’augmentation du
trafic. Monsieur Astier est inquiet car à l’heure actuelle la loi sur l’air
n’est pas respectée.
6)
La
grande partie de la gêne sonore provient de la route
même si des progrès sont encore à réaliser du côté ferroviaire. Les
buttes anti-bruit disposées dernièrement le long de l’A22 ont renforcé les
nuisances phoniques pour la majorité des riverains ! Le passage en 2x3
voies de l’A22 et une A24 aggraveraient encore la situation. Que nous
promet-on pour limiter les nuisances le long de la future A24 ? La seule
solution c’est de recouvrir l’A22 et d’enterrer l’A24. La SANEF est-elle
prête à prendre en compte les énormes dépenses que cela impliquerait ?
7)
La FNTR dénonce l’emploi des chauffeurs des pays
de l’Est, comme les Bulgares employés par Willy Betz. Ils coûtent
3500 F charges inclues pour 72 H de travail par semaine et partent pour un mois,
un chauffeur routier français à son entreprise coûte 25000 F pour 52 h de
travail hebdomadaire. L’accident du Gothard est l’illustration de ce phénomène.
Les sondages montrent qu’il se développe un sentiment d’insécurité car si
les poids lourds ne génèrent pas plus d’accidents (5% du trafic pour environ
5% des accidents) mais ils provoquent 15% des morts. Nous
avons de nouveaux forçats de la route mal payés, mal formés, fatigués,
dangereux alors que les entreprises Françaises ont largement investi et sont
arrivées à réduire les accidents de la route. Elles se trouvent
alors confrontées à une concurrence déloyale car elles supportent des charges
fiscales, sociales et sécuritaires que les étrangers ne supportent pas. A
l’heure actuelle de nombreuses entreprises de transports risquent de disparaître,
il nous restera les entreprises des pays de l’Est qu’il est difficile de
contrôler, de sanctionner et qui ne se sentent pas concernées par nos lois et
notre qualité de vie.
Du
point de vue économique le modèle actuel ne tient pas.
Du
point de vue environnemental le modèle actuel ne tient pas.
Du
point de vue social le modèle actuel ne tient pas.
Le
collectif contre les nuisances routières lutte contre l’A24 non pas parce que
les riverains s’opposent à la construction d’une autoroute mais parce que c’est
une mauvaise réponse à une question mal posée.
Jean-Pierre Balduyck a proposé aux associations une nouvelle rencontre pour approfondir les sujets évoqués dans le débat. Le collectif n’hésitera pas à lui demander son aide pour la mise en œuvre d’un agenda 21 sur une partie de sa circonscription.
Hervé
Dizy. Président du collectif